vendredi 5 août 2022

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J'essaie de remonter le fil quand tout devient trop submergeant.

Ça allait pas trop mal en 2015, j'étais dans une trajectoire d'ascension pro, la rupture tant espérée avec J., la rencontre avec l'autre J, puis la mutation à Paris...etc. Les rencontres amicales aussi, qui m'ont tant nourrie, même si beaucoup ont disparu (mais pas toutes heureusement).

Pourtant, rapidement, ça n'allait plus avec J., trop de disputes, de jalousies, j'étais trop centrée sur cette relation, j'en attendais trop mais au moins, j'en attendais pas autant de mon entourage, donc les problèmes restaient "intérieurs" quelque part, dans le secret de mon appart, de mon couple, même si ça ne rimait plus à rien.

Et puis quelque chose s'est inversé courant 2018 - 2019.

Il y a peut-être plusieurs raisons, peut-être il n'y en a aucune de vrai.

Ça s'est mal passé dans le 2e boulot, très mal même, à partir de janvier 2018. L'horreur complète, était-ce du harcélement caractérisé je n'en sais rien mais j'ai perdu une partie de moi-même là bas. Cette partie de moi-même qui pensait que j'étais quelqu'un de motivée par le bien, quelqu'un qui essayait de bien agir, de respecter les gens, même si bien sur j'ai toujours eu aussi cette partie de moi qui était capable d'une grande hypocrisie, dézinguer les gens dans leur dos, en conservant une bonne figure par devant, parce que je ne voulais pas d'histoire de toutes façons et puis aussi peut-être parce que je voulais laisser le bénéfice du doute aux gens, comme j'aimerais qu'ils me laissent le bénéfice du doute.

Mais cette attitude ne va pas, elle manque de logique, de consistance, de rationalité. Je fonctionne comme ça, mais pour beaucoup c'est incompréhensible, c'est de la duplicité, du machiavélisme. Je suis capable d'une grande hypocrisie mais cette hypocrisie ne me fait pas pour autant passer à une action "malveillante" directe envers les gens. Je les taille avec des gens de confiance pour pouvoir les supporter le jour d'après, pour avoir éventuellement confirmation des choses que j'ai noté et qui m'ont posé problème, mais quelque part, je continue à me comporter "gentiment" avec les gens que je dézingue. C'est une manière de pouvoir verbaliser ces pensées de colère qui me viennent sur les gens et que j'ai besoin d'extérioriser mais qui ensuite passent car elles ne sont que ça, que des pensées sur les gens qui me posent problème à un moment puis qui passent, car les gens ne sont pas définis par ce que je pense d'eux.

Mais cette fois, ça n'a pas fonctionné. Cette fois, quelqu'un m'a entendu et ça a déclenché pas mal de réactions en chaîne. Ça a été dur pendant un an et demi. Quoique je faisais, quoique je disais, rien ne permettait de retrouver une "dignité" auprès des personnes impliquées. Je n'étais plus humaine, j'étais un déchet, une fille qui cherchait les histoires, quelqu'un que l'on peut brutaliser et qui se laisse brutaliser. Rien ne pouvait convaincre que je n'étais pas ça ou pas totalement. Avec ce sentiment d'injustice atroce car cela ne manquait pas de sel de la part de quelqu'un qui avait provoqué des histoires en permanence depuis des années et avait détruit d'autres gens, en particulier des femmes. Une partie de moi-même est restée là bas. Où peut-être que cette partie de moi que je détestais déjà enfant, cette partie de moi vu comme manipulatrice, cachottière, malveillante, a été re-convoquée par cette histoire. Il a fallu vivre avec les conséquences, les bruits de couloirs, les "ah oui c'est toi cette collègue qui...?", le syndicat qui me bazarde avec l'eau du bain ("il faut arrêter de vouloir contre-attaquer, sinon cela va te suivre")...etc.

Et puis Noël 2018 est arrivé. Ces problèmes familiaux, disputes à mort.

Je servais déjà d'oreille compatissante aux uns et aux autres depuis des années. Je ne comprenais pas que cette place me faisait du mal et en même temps, que j'en avais besoin car je me sentais importante, que j'avais l'impression d'avoir une place dans cette famille. Les gens me contactaient pour ça (pratiquement que pour ça pour certains), je les écoutais, j'en apprenais sur les uns et les autres. Je savais tenir ma langue (ici en tout cas) donc mon écoute était recherchée quelque part.

Et puis Noël 2018, et ma mère et ma tante se sont empoignées verbalement. J'ai maladroitement contactée ma tante pour lui dire que j'en avais été très choquée et elle s'en est reprise à ma mère, et je m'en suis sentie très coupable. Mon frère, qui me contactait rarement, a miraculeusement retrouvé mon numéro de téléphone pour me demander de régler le problème avec mon cousin. Et puis ma mère m'a aussi rappelé par dessus le marché en concluant son coup de fil par un aigre-doux "je suis très étonnée que tu m'écoutes car j'avais peur que tu m'en mette plein la tête" (sous entendu "comme d'habitude") et aussi "tu aurais du régler ça avec ta tante, ça aurait évité qu'elle s'en prenne à moi" qui m'ont coupé les jambes. 

Mes efforts relationnels des dernières années m'ont semblé être balayé d'un revers de main. Tout ce que moi je m'étais aussi pris dans la tête enfant, ado ou jeune adulte. Les "tu es trop exigeante", les "si je te rencontrais, tu ne serais pas mon amie", les "tu t'habilles trop mal", les injonctions "ne pas accepter ce concours", "ne pas demander cette mutation" car ce serait mieux pour moi...me sont revenus à l'esprit. 

Mais c'était moi qui était la mauvaise fille dont on était étonné de l'attitude exceptionnellement normale pour une fois.

Ce Noël et ces différentes conversations m'ont vraiment bouleversées. Je me suis sentie, comme à mon travail, utilisée, pas respectée. Un déchet, pas une personne digne de respect et d'une place à elle. Je n'étais là que pour régler les conflits et écouter les saloperies des uns et des autres sur les uns et les autres et j'avais échoué. 

J'avais échoué au travail dans ma manière de dire que je n'appréciais pas le comportement de mon collègue envers S. puisque je l'avais fait hypocritement et que ça s'était retourné contre moi. 

J'avais échoué à résoudre les conflits dans ma famille et il m'en fallait m'en justifier, redoubler d'efforts pour réconcilier des gens entre eux qui ne faisaient par ailleurs aucun effort eux-même. Consoler ma propre mère sur ses problèmes avec ma propre tante. Et cerise sur le gâteau, j'ai eu l'impression d'être sacrifiée sur l'autel de ces conflits lorsque ma tante, après que je lui ai envoyé le premier message après deux ans de silence de sa part en m'excusant moi, m'a répondu quelque chose comme "je t'informe que je me suis excusée auprès de ta mère et que j'aimerais que tu comprennes que je souhaite aller vers des relations apaisées avec elle" (sous-entendu "merci d’arrêter de mettre de l'huile sur le feu"). Que celui qui n'a jamais mis d'huile sur le feu dans cette famille me jette la première pierre...

Cette année 2018 a été une sorte d'annus horribilis. S'ouvrant sur les problèmes au travail et se terminant sur ce Noël de l'enfer...

En 2019, je ne suis pas descendue à Noël, utilisant les grèves de train comme prétexte, je n'y arrivais pas et rester seule chez moi m'a fait beaucoup de bien et beaucoup de mal à la fois, une grande culpabilité.

En 2020, je ne me souviens plus mais je crois que j'ai été dans la famille de J., même si ça me faisait plaisir de les voir, ça m'arrangeait bien aussi. 

Je déteste Noël sans mes grands-parents, je déteste ces Noël qui me rappelle que ma famille a volé en éclat, je ne peux pas accepter de faire bonne figure pour quelques heures vis-à-vis de mon frère qui ne me contacte jamais, ne répond pas à mes messages et ne me donne jamais de nouvelles des enfants. Alors je n'y vais plus, aggravant de fait mon cas, déjà bien chargé.

Beaucoup de choses ont changé en 2018 et ça ne va plus très bien depuis. Ca va beaucoup mieux au travail, même si je me méfie de tout et que je n'arrive plus à lier avec qui que ce soit (ai-je jamais réussir à le faire, ce n'est pas sur ceci dit). Ca n'a été que de mal en pis avec ma famille, mes parents, mon frère. Je ne les supporte plus, je ne supporte pas la manière dont j'ai l'impression d'être traitée. Je n'ai plus vu mon frère depuis février 2020 et alors qu'avant, j'aurais fait bonne figure devant cette situation, les messages sans réponse, je n'y arrive plus. Je me retire de plus en plus dans ma tanière, je n'ai plus d'énergie pour en sortir.

En parallèle, ça va mieux avec J. petit à petit. Les vases communicants quelque part.

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