mardi 1 novembre 2022

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Ça m'a fait vraiment du bien ces quelques jours à Paris un peu hors du temps et de faire le pont mais demain, ce sera reparti au boulot. 

J'ai hâte de retourner voir le psy (merci le transfert) et de m'affaler dans son canapé et de regarder la pluie et les feuilles tomber dans sa cour, en pleurnichant sur ma vie. 

Je me sens bien et mal à la fois. Mal au boulot mais il faudra tenir jusqu'à Noël. Bien quand je travaille pour l'association et que je sors de moi-même et de mon égotisme et que je me sens enfin utile, même si c'est une platitude de dire ça. Bien aussi quand je joue au rugby avec les autres, même si je m'agace parfois et que je suis toujours aussi nulle.

Mes parents vont venir pour le déménagement et ils sont hyper sympas en ce moment, à tel point que ça en devient gênant. Comment rester crédible quand je leur dirais que je ne viendrais pas à Noël alors qu'ils me couvrent de cadeaux depuis quelques temps et qu'ils viendront nous aider à déménager, même si on a pas spécialement demandé ? Je ne serais pas crédible, comme toujours...

La perspective de mettre enfin les pieds dans le plat par rapport à mon frère qui me semblait une réelle possibilité il y a quelques semaines s'est complétement éloignée depuis quelques temps. Je me dis qu'il faut pas que je leur fasse de la peine, qu'ils n'y sont pour rien, qu'ils font plein d'efforts, que c'est moi la névrosée, l'ingrate, la folle. Et quelque part c'est vrai. Et quelque part aussi, j'ai ma part de lucidité.

Parfois, je me dis que tout le monde va très bien, y a que moi qui me traîne mon éternel mal-être en essayant d'en rendre tout le monde responsable sauf moi, histoire de me remonter moi-même en rabaissant les autres. Et parfois je me dis que c'est tellement injuste que personne ne comprenne, que jamais ne pardonnerais ce coup de poings que mon frère m'avait donné quand j'avais 10 ans, que jamais je ne pardonnerais ma famille de m'avoir éduqué pour faire constamment bonne figure, comme quand je m'étais fait casser la gueule par ce type en primaire et que j'étais rentrée à la maison l'air de rien, sans même qu'advienne à mon esprit la possibilité d'en parler.

Et pourtant, j'en suis pas morte de tout ça. D'autres ont vécu pire. Et moi-même j'ai très certainement infligé pire à d'autres, pas physiquement mais psychologiquement parlant. Tout le monde a quelque chose à se reprocher en ce bas monde, on dirait et je ne déroge pas à la règle.

Alors mes rêveries me sauvent de trop d'angoisses. Je voudrais aller seule à Ouessant à Noël, prendre une chambre dans cet hôtel à Brest et puis prendre le bateau tôt le matin pour Ouessant et puis voir les moutons, les mouettes et les goélands. Marcher sur la côte, avec la flotte sur la figure et les éclaircies bretonnes dans les yeux.